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Yoan Béliard

Artiste pluridisciplinaire, Yoan Béliard sonde la capacité spécifique des images à convoquer divers imaginaires et temporalités tout autant que la manière dont elles les perpétuent et les nourrissent. C’est à travers une pratique hybride de sculpture, collecte, photographie et collage qu’il interroge la construction des inconscients collectifs et la profonde dépendance aux images des savoirs contemporains. La série L’artefact et son ombre, 2023, présentée à l’occasion de la dernière édition d’A ppr oc he par la galerie Valérie Delaunay, explore quant à elle la matérialité de la photographie et en interroge l'étrange ubiquité, entre production humaine et élément sensible autonome.

 

C’est effectivement cette nature double, à la fois empreinte et objet à part entière, qui constitue le point de départ de ce travail. Dont le titre introduit la problématique centrale avec la notion d’artefact, désignant aussi bien les productions humaines que les traces, distordissions et autres anomalies qui peuvent marquer une photographie. Cette notion prend corps pour l’artiste avec des images dénichées dans de vieux ouvrages d’archéologie dont le contenu semble voir, avec chaque œuvre, son prolongement ou sa réincarnation. D’objets quotidiens à éléments d’étude archéologique, ces artefacts dématérialisés par notre archivage reprennent ici forme, réactualisés. Ce qui permet à l’artiste d’interroger notre rapport intime et collectif à l’Histoire dont ils sont les témoins.

 

Les amphore, vasque et autres jarres que produit Yoan Béliard se posent ici comme des vestiges manufacturés, trompes l’œil tridimensionnels. Lesquels, nourris du rapport profondément subjectif que nous entretenons à la mémoire, révèlent ici la nature chimérique, artificielle, et surtout multiple de la notion d’Histoire. L’artiste brouille ainsi les frontières, alternant entre de véritables objets marqués par le temps, des reproduction de ceux-ci et des éléments manufacturés, inventés, permettant de lier le tout. Ses images, lisses ou granuleuses, s’ajoutent au tout, directement inscrites par transfert dans le plâtre, matière première de ces œuvres. Le va-et-vient constant ainsi provoqué place les spectateur.rice.s, déstabilisé.e.s, sur une fine frontière entre passé et présent, photographie et photographié, réel et imaginaire. 

L’artefact semble de fait constituer pour Yoan Béliard le maillon manquant entre une vision unilatérale et simplifiant l’Histoire, et la multitude d’approches, expériences, sensibilités dont elle est faite. Aujourd’hui profondément lié aux images, le savoir est ici dévoilé comme un maillage complexe de multiples conceptions et perceptions subjectives, pourtant présentées comme « rationnelles » ou « réelles » sans jamais voir leur origine interrogée. C’est ainsi la profonde partialité de la connaissance et son lien à la photographie que L’artefact et son ombre invite à embrasser. 

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