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Kensuke Koike

C’est avec beaucoup de dérision et de recul que Kensuke Koike approche la photographie. Détaché de toute position d’opérateur, les clichés qui constituent la base de sa pratique ne sont jamais les siens. Dénichés de marchés aux puces en brocantes, partout où le peut l’artiste, ils constituent non seulement une archive extraordinaire d’images dites vernaculaires ou désaffectées, mais également un large socle à partir duquel développer son regard singulier. L’histoire semble pour lui faite d’un assemblage hétérogène de narrations visuelles, au sein desquelles il vient directement tailler afin d’en déceler les rouages et, peut-être, inviter à une forme de réappropriation. Entre satyre, uchronie et roman photo, la rétrospective qu’en propose la Galerie Open Doors lors de la 7ème édition d’A ppr oc he reprend divers éléments tirés de séries au long cours comme Single Image Processing ou Today’s Curiosity, mais dévoile également plusieurs tirages inédits de son nouveau projet Feel Better Now?.

Pour chaque pièce, unique, Kensuke Koike découpe, taille, évide et déchire ces portraits vintage et s’impose, à quelques exceptions près, de n’enlever ni ajouter aucune matière à l’originale. Ce procédé à la performativité omniprésente autant que discrète développe de nouvelles narrations à partir de ce matériau photographique oublié, trace souvent négligée de notre passé. Les objets-images que s’approprie l’artiste sont systématiquement des originaux nécessitant, dans son approche, une longue réflexion et préparation ainsi qu’une grande habilité afin obtenir, du premier coup, l’effet escompté. Que ce soit selon les protocoles mis en place en 2015 lors d’un projet en collaboration avec Thomas Sauvin, No More No Less, ou bien par l’expérimentation autour de la sérigraphie, Koike construit un univers visuel où s’entremêlent les échos de divers imaginaires – surréaliste, psychédélique, rétrofuturiste, dystopique ou encore minimaliste. Il y interroge par un jeu intelligent et un regard aussi décalé qu’espiègle notre rapport à la vision, au monde qui nous entoure et, de fait, à la photographie. Les compositions qui émergent de ses manipulations sont touchantes, irrévérencieuses, parfois choquantes, souvent drôles, et autant d’invitations à sortir des carcans du regard et à repenser nos cultures visuels.

Pourtant discret, l’artiste japonais basé à Venise partage abondamment ses expérimentations sur différents réseaux dans une démarche didactique, mise en avant de leur dimension performative. Désacraliser la relation que nous entretenons aux images photographiques permet également à Kensuke Koike de mettre en lumière la multitude de regards, témoignages d’époques et cultures distinctes, qui font notre histoire et inconscient collectif. La capacité de réappropriation, la diversité et l’importance du travail de mémoire, d’attention, de soin constituent ainsi le cœur de ses œuvres.

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