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Guillaume Chamahian

Quel poids possède le trillion et quelques de clichés produit chaque année par l’humanité, et que va-il devenir ? Que restera-t-il de cette société de l’image que nous avons consciencieusement édifiée et élargie depuis deux cents ans jusqu’à l’avoir globalisé ? À l’origine des Nuits Photographiques de Paris et de divers autres projets d’envergure, Guillaume Chamahian se confronte directement à ses questions à travers deux récents projets.

Quand on avale il se produit un grand tumulte, série en cours présentée lors du Printemps de l’Art Contemporain en mai 2023 accompagnée par la compositrice Héloïse Francesconi, constitue une sorte de répertoire en constante évolution. Riche de plus de 1300 images, il tente d’encapsuler les multiples facettes de l’humanité. Les images qui le composent, systématiquement détachées sur fond noir, traversent notre (nos) histoire(s) et balayent ainsi un large spectre afin de dessiner une humanité aux contours hétérogènes : allant de peintures du XVIème siècle à des études mécaniques en passant par des images d’archive ou des éléments centraux à diverses cultures.

En dialogue avec ce travail au long cours, Guillaume Chamahian et sa galerie Analix Forever présentent à l’occasion de la dernière édition du Salon A ppr oc he la série Détritique, à laquelle ce titre donne le ton. Dans cette exploration de la survivance des images et de leur devenir tant symbolique que physique, l’artiste inscrit littéralement « dans la pierre » une portion scrupuleusement choisie de sa banque d’images. Cette série d’impressions UV sur marbre, basalte (du Zimbabwe précise-t-il) ou encore sur grès, qu’il produit lui-même, pose ainsi la question de l’incidence de la matière photographique à laquelle nous sommes quotidiennement confronté.e.s. La sélection de clichés explore de nombreuses références historiques et culturelles, tantôt de niche, tantôt largement partagées, soulignant leur profonde subjectivité.

Subjectivité que Guillaume Chamayan nous remet entre les mains en même temps que ses tablettes de pierre imprimées, dans un geste aussi banal que symbolique, nous confiant le travail individuel et collectif de situation face à nos mémoires. La nature sédimentaire du support choisi pour ses clichés permet à l’artiste marseillais de brosser le portrait d’une société dont l’image est devenue, par accrétion et à un rythme exponentiel, le socle. Potentiel riche lisier à un développement en conscience vis-à-vis de notre passé, cette masse dont la dématérialisation est de plus en plus efficace semble pourtant ici révéler l’inconsistance et le « présentisme » sur lesquels se bâtissent les nouvelles générations.

 

Se projetant dans un futur lointain, l’artiste et sa galeriste aiment à imaginer qu’une espèce inconnue découvrant la Terre, longtemps après le passage des humains, retrouverait comme seule trace tangible et durable de notre passage en battement d’obturateur sur terre les plaques de Guillaume Chamayan.

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